Lors d'un affrontement avec une quarantaine de jeunes dans le quartier de la Madeleine, quatre policiers ont été blessés. Si le ministre de l'Intérieur a annoncé un renfort de 5 postes, un syndicat policier explique pourquoi ce n'est ni suffisant ni adapté à la spécificité de l'Eure.
Trois quartiers d'Evreux avait déjà été le théâtre de violences urbaines le 13 juillet 2020. Un confinement plus tard, c'est à Pâques dans la soirée du samedi 3 avril 2021, que des policiers ont été blessés dans le quartier de la Madeleine lors de nouvelles violences. Dimanche, les premières informations évoquaient la piste d'une attaque préméditée, précédée d'appels relayés sur les réseaux sociaux pour s'en prendre aux forces de l'ordre avec des tirs de mortier et des jets de cocktails molotov.
"Une lutte contre les trafics qui gêne"
Pourquoi cet affrontement ? A l'hôtel de police d'Evreux un responsable syndical a son explication :
"En fait le cheval de bataille de notre ministre, c'est la lutte contre les trafics. Et n'étant pas dans des zones de non-droit, les collègues luttent contre les trafics, interviennent dans les quartiers, font cesser les trafics et procèdent à des interpellations. Et cela gêne."
Ce qui fait que sur les réseaux sociaux on parle de "zèle policier" avec des appels à "se faire du flic", et cela crée des violences urbaines"
"Des collègues sous le choc et énervés"
Selon ce responsable syndical interrogé ce lundi 4 avril à Evreux par notre journaliste Myriam Libert, le climat est tendu depuis plusieurs mois à Evreux où les policiers sont confrontés quotidiennement à de l'agressivité, à de plus en plus de violence et à un sentiment d'impunité lié à "un manque de réponse pénale". Inquiets, et se sentant oubliés (alors que des renforts ont été annoncés pour deux plus petites villes du département, à savoir Vernon et Val de Reuil), ils attendent des actes de la part des élus, des "politiques" et de leur ministre.
La réponse de Gérald Darmanin
Au lendemain des évènements d'Evreux, le ministre de l'Intérieur, après avoir condamné "très fermement les violences inacceptables qui se sont produites" a annoncé dans un communiqué que "5 policiers supplémentaires seront affectés en 2021 à la circonscription de sécurité publique (CSP) d’Evreux dont 3 dès le mois de mai prochain. Ces policiers seront prioritairement placés sur le terrain, au contact de la population et permettront de mener davantage d’opérations, en particulier contre les trafics de stupéfiants."
"Des effectifs insuffisants"
L'annonce du ministre de l'Intérieur ne satisfait pas le responsable syndical eurois. Il rappelle que ses collègues dénoncent depuis des mois le manque d'effectif, qui, à Evreux, a des conséquences sur les conditions de travail allant jusqu'à "ce qu'on espérait ne pas voir : des policiers blessés".
Selon les calculs de Johann Maugé, secrétaire départemental du syndicat Unité SGP Police de l'Eure, "pour renflouer le manque d'effectif à Evreux, il faudrait au moins une quinzaine, voire une vingtaine d'effectifs, de façon à pouvoir fournir les brigades de roulement, la BAC, les services d'investigation…"
Le cruel manque d'attractivité du département de l'Eure
Mais encore faut-il que ces nouveaux policiers, une fois envoyés à Evreux, y restent, car comme l'explique Johann Maugé, une fois en poste, ils veulent repartir vers d'autres départements :
"Le problème qu'on a dans l'Eure, c'est le manque d'attractivité. Il faudrait donc voir à long terme, pour obtenir la prime de fidélisation qui permettrait d'avoir moins de départs que d'arrivées. Les départements limitrophes (tels que l'Eure et Loir ou la Seine-Maritime) ont cette prime.
Donc, quand des collègues demandent leur mutation, ils préfèrent aller dans des départements ou des services où ils ont cette prime. A Evreux, nous ne l'avons pas. Alors que les violences urbaines ou la criminalité font que nous sommes largement dans les critères d'attribution de cette prime".
Pour rappel, dans la nuit du 3 au 4 avril, après les violences où 4 policiers ont été blessés dont deux gravement, 6 personnes ont été interpellées, dont 5 placées en garde à vue.